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Mon père, le fondateur de l’école de piano en France, était alors âgé de 45 ans. Né en 1758 à Mitterneltz, petit village à quelques lieues de Strasbourg, il était venu à Paris à l’âge de 15 ans. Les exécutants étaient rares alors et mon père jouit d’une vogue qu’il conserva pendant toute sa longue carrière. Ami et protégé de Gluck, il réduisait pour le clavecin et le piano presque tous les opéras de ce grand maître à leur apparition. Mon père se maria fort jeune ; il épousa d’abord la fille d’un marchand de musique et perdit sa jeune femme après une année de mariage.

Pendant la Révolution, il se remaria et épousa une sœur du marquis de Louvois ; le contrat de mariage porte la signature du mineur Louvois. Mon père eut, de ce mariage, une fille qui vit encore et qui est mariée à un colonel de génie en retraite ; elle habite Dijon avec sa famille. La seconde union de mon père ne fut pas heureuse ; il divorça : sa femme épousa le comte de Ganne et est morte, il y a peu d’années.

Ma jeunesse se passa dans une grande aisance. Ma mère avait apporté une centaine de mille francs à mon père ; il était le maître de piano à la mode sous l’Empire, je voyais souvent à la maison le comte de Lacépède, grand amateur de musique et presque toutes les célébrités de cette époque.

À sept ans, je ne savais pas lire, je ne voulais rien