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blait que l’exécution avait été meilleure à la première représentation.

— Oh ! cela n’est pas étonnant, me répondit-il ; c’est aujourd’hui samedi.

Je n’osai pas encore avouer mon ignorance, et j’allai sur le théâtre ; je croyais trouver les chanteurs furieux d’avoir été si sauvagement accompagnés ; aucun d’eux n’y songeait. Je pris mon courage à deux mains, et m’approchant du régisseur :

— Monsieur, lui dis-je, je sais fort bien que c’est aujourd’hui samedi ; mais dites-moi, de grâce, en vertu de quelle loi les musiciens sont obligés d’exécuter aussi épouvantablement qu’ils le font, à ce qu’il paraît, d’ordinaire, ce jour-là ?

— C’est, Monsieur, me répondit-il, que dans nos théâtres on paie tous les samedis et que les musiciens ne manquent jamais de passer immédiatement de la caisse au public house (cabaret).

Je remerciai beaucoup le régisseur de son explication, et le laissai grandement édifié sur la tempérance des musiciens français, en lui apprenant qu’à Paris un opéra s’exécutait aussi bien les jours de paiement que ceux où la caisse n’est pas ouverte. Revenons donc à nos compatriotes.

Ce mot de musicien n’est qu’un titre générique qui s’applique à une classe très-étendue d’individus dont les mœurs n’ont souvent aucun rapport entre elles. Car MM. Rossini et Meyerbeer sont tous deux musiciens, et le misérable qui vient faire leur désespoir, en tournant une odieuse manivelle sous leurs fenê-