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nier ; je savais les résultats des élections de la journée et n’en parlai à personne, lorsque l’Impératrice m’aborde et me dit :

« Eh bien, votre ami Pelletan est nommé. »

Je m’incline en silence. « Mais défendez-le donc, ajoute l’Impératrice. — Madame, répondis-je, je n’ai pas à défendre ceux qui triomphent. Elle me toisa sans bienveillance, je vous l’avoue. »

Pelletan était, pour le monde officiel, un épouvantail, la Révolution faite homme. Avec ses yeux sombres, sa barbe noire, ses sourcils épais, son air fatal, il inspirait plus de crainte que les autres élus.

Pelletan répond à Mme de Pierreclos, qui lui a écrit en notre nom et nous remercie. Il nous parle de M. Thiers et de son activité politique. Certes, il n’approuve aucune des idées du « petit homme » ni sa tactique parlementaire, mais il constate qu’avec lui l’opposition prend corps ; que toutes les conférences des avocats, tous les articles d’écrivains, toutes les manifestations d’étudiants, n’eussent jamais donné à l’opposition le caractère que lui donne M. Thiers vis-à-vis du bourgeois.

« M. Thiers n’est pas un ennemi de l’épopée impériale, ajoute Pelletan ; au contraire, il l’a cultivée et surélevée. S’il demande des libertés, c’est qu’elles sont nécessaires. On sait bien que lui-même, qui a fait des lois peu tendres pour la presse, ne réduirait pas l’autorité à l’im-