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« Mérimée, me dit le docteur Maure, est dans un tel état d’exaspération qu’il en est arrivé à me citer une phrase de Challemel-Lacour en me déclarant qu’on pousse les révolutionnaires à parler ainsi. Et cette phrase de Challemel est effroyable, ajoute le docteur Maure, jugez-en : « Infamie, lâcheté, canaillerie, platitude, voilà le résumé de la France française et de la France italienne ! » Mérimée me citant cela, qu’en pensez-vous ? »

J’ai emporté pour mes lectures les Poèmes Barbares, et je les lis en belle lumière. Ils ont plus d’éclat que dans les brumes parisiennes ou chaunoises. Je croyais voir, au couchant du soleil, lorsque l’Estérel se couvre de teintes violettes tragiques, dévaler ici et là les Panthères Noires.

Girardin m’écrit : « Mon ami de Lesseps est triomphant. J’imagine l’émotion qu’a pu ressentir un homme de notre taille moderne quand il a vu la Méditerranée entrer dans le lac Timsah et se précipiter dans la mer Rouge. La terre a dû en ressentir quelque ébranlement. Savez-vous qu’un moment, à la mort de Mohamed, tout a failli être remis en cause. Les Anglais ne rient plus, et le mot historique de Palmerston : « L’escroquerie que, lui vivant, il ne laissera pas commettre, » devient bien ridicule. Un secret, chut ! Je vais reprendre la Presse. Pas un mot à votre seconde oreille. »

Jean Reynaud arrive. Il a lu en wagon une