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il a le savoir, il a la prescience. Sais-tu ce que Renan nous en a dit un jour, au Palais-Royal ? « C’est un génie ! »

— Moi, répondit Sarcey, ce n’est pas avec des exagérations qu’on me convainc de ceci ou de cela, au contraire. Je voudrais voir aux nouveaux normaliens, à Paradol, à Assolant, à toi, et même au dernier ancien comme Challemel, un autre esprit, ne pas les trouver toujours à l’avant-garde des mots, mais à l’arrière-garde de la pensée, comme les Cousin, les Guizot, les Villemain. J’ai mon idéal du normalien penseur et calme.

— Tu as Taine, mais il n’est autre que dans la forme, il ne s’y prend pas comme nous pour batailler, pour détruire, voilà tout. Mais avec son positivisme, son doctrinisme, son scientifisme, son spinosisme, son documentisme, son observationisme, son criticisme, il nous fera des générations de cataloguistes, d’expérimentistes, de réalistes, d’analystes, d’exactistes, mortellementistes anti-idéalistes, anti-artistes, anti-français, anti-gaulois ! Moi, je reste fantaisiste, mais spiritualiste pour le moins. La seule chose qui te touche dans Taine, c’est sa préoccupation de ne pas perdre son bon sens. Il te séduit par tes faiblesses. Il fait de La Fontaine le premier des éducateurs et il en arrivera pour te plaire à exalter Boileau !

— Tout ce que tu dis là, repartit Sarcey, malgré sa forme de boutade spirituelle, n’est