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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

rayon de lune, qui tombe en éventail d’argent sur son couvre-lit. Mais on connaît cette lutte contre soi-même. La respiration est courte. On essaie de toutes ses forces de retenir ses larmes entre ses prunelles. Mais leur flot se gonfle, se gonfle, jusqu’à ce que sur sa joue on sente le débordement d’une rosée brûlante... Arlette se tait : — J’ai accepté, continue Telcide, parce que M. Duthoit présente les meilleures garanties. Il m’a été recommandé par M. Hyacinthe. Et je suis persuadée que M. le Grand Doyen approuvera ma décision... Vous ne dites rien !... Est-ce que, par hasard, vous ne la ratifieriez point ? — Je regrette seulement, ma cousine, que vous ne m’ayez pas consultée. Pour épouser un homme, il faut l’aimer, je n’aime pas M. Duthoit. — Et pourquoi ne l’aimez-vous pas ? — Parce qu’il est fat... — Fat ? — Et ridicule... Le sourire de Telcide a disparu. Les lèvres crispées, elle agite la tête comme si son col la gênait. Arlette a séché ses larmes. Et son visage froid révèle chez elle une énergie farouche : — Vous l’avez jugé en Parisienne, lui dit Telcide. Je vous amènerai à une plus exacte appréciation des choses. — Comme vous ne pourrez jamais changer ce jeune pion, vous ne pourrez jamais changer mon opinion... Si vous me forciez à l’épouser, je le battrais... — Vous ?... — Mais tranquillisez-vous. Nous n’en arriverons pas à cette extrémité. J’ai décidé de ne pas me marier... Réellement ! Ma cousine, je ne plaisante pas. Je ne me sens aucune vocation pour le mariage. Depuis que je vis auprès de vous, mes idées ont beaucoup évolué. Vous avez une existence si calme, si ordonnée, si reposante que je me demande si l’état de vieille demoiselle n’est pas l’état idéal. — Taisez-vous... Vous deviendriez impertinente ! — Oh ! — Je n’aurais pas voulu vous le rappeler. Mais