Page:Acremant - Ces Dames aux chapeaux vert, 1922.djvu/21

Cette page n’a pas encore été corrigée


CHAPITRE II


Dans leur salle à manger, propre et calme, les quatre demoiselles Davernis sont réunies. Elles échangent quelques menus propos, lorsque Jeanne se tourne vers Rosalie :

— Je crois que neuf heures viennent de tinter à la cathédrale. Ma bonne sœur, voici le moment de partir…

— Vous avez raison. Je monte chercher nos houppelandes…

C’est presque à voix basse qu’elles ont dit cela. Il y a des maisons dans lesquelles on n’ose point parler haut, comme si on avait peur d’éveiller des fantômes dans les coins. Mais Telcide, l’aînée des dames aux chapeaux verts, n’éprouve pas cette crainte :

— Mon Dieu ! mon Dieu ! dit-elle sur un ton aigre, que je suis donc chagrinée de vous voir ainsi sortir en pleine nuit !… Au moins ne vous refroidissez pas dans les ténèbres…

D’un claquement de la langue contre son palais, elle indique le degré de son ennui.

— Tranquillisez-vous, ma bonne sœur Telcide, reprend Jeanne ; comme notre sœur Marie nous l’a conseillé, nous mettrons nos petites camisoles de laine sous nos grandes pèlerines…

— Surtout n’oubliez pas de tenir votre mouchoir devant la bouche. On m’a affirmé que ce remède est souverain contre le brouillard. Jeanne, vous êtes faible des bronches. Vous devriez prendre un « boulot ». On s’enrhume moins lorsqu’on suce une friandise…

Comme Ernestine, la bonne, se tient debout à la porte, Telcide lui commande de prendre dans le buffet la boîte cylindrique en fer-blanc, qui renferme les mor-