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admis, protestants, libres penseurs, israélites. Nous ne ressemblons en rien aux Universités populaires : chez nous, les idées d’abord sont différentes, et puis surtout l’initiative vient d’en bas, du peuple, tandis que, chez nos adversaires, elle vient d’en haut, des intellectuels. Une fédération rattache entre eux ces instituts. Comprenez-vous ?

Il m’eût été difficile vraiment de ne pas comprendre, tant la parole de mon interlocuteur était claire et précise, et n’ayant point d’objection à lui adresser je me contentais de l’écouter en silence.

— Il y a cinq ans, reprit-il, nous étions douze ! Aujourd’hui nous sommes des milliers. Le Sillon, voyez-vous, c’est une amitié, c’est une âme commune. Nul n’est payé chez nous : chacun travaille pour la cause, comme nous disons. Nous sommes tous égaux, nous nous tutoyons tous ; je ne suis pas leur maître, je suis leur frère. Songez que tous ces jeunes gens, leur travail fini, viennent ici, après dîner, s’occuper jusqu’à minuit de l’œuvre, et ceux qui constituent la jeune garde, voués à la surveillance de nos réunions et à la défense de leurs camarades, donneraient facilement leur vie. L’existence que nous menons entre nous, c’est l’idéal démocratique dont nous tentons la réalisation.

— Vous êtes enfin, lui dis-je, des démocrates catholiques ?

— Oui, si vous voulez, fit-il, encore que je n’aime pas être catalogué sous un titre. Nous n’avons pas de programme défini, parce qu’un