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vement, puis on s’en retourne avec défiance :

« Qu’est-ce qu’il veut ? pense-t-on. Qu’est-ce qu’il va nous demander ? » Et quand on voit que je ne veux rien, que je ne demande rien, on est alors tout à fait troublé, on est sûr que je médite quelque mauvais coup. Et puis, la Nièvre a ses grands hommes, qui ne la quittent pas, qui vivent toujours à l’ombre de ses bois, au bord de sa rivière… Ceux-là, personne ne les ignore. Vous pouvez citer le nom de Claude Tiller, de Milien, de Courmont et de plusieurs autres Nivernais, chacun a lu leurs proses ou leurs vers. La revue qui paraît à Nevers ne laisse dans l’oubli aucune de ses gloires locales, mais elle ne m’a jamais consacré un article. Tenez ! Poil-de-Carotte avait beaucoup accru ma réputation ; du moins naïvement je l’imaginais. Quand on le joua à Nevers, l’imprésario annonça que l’auteur était un enfant de la contrée et qu’il parlerait lui-même de sa pièce avant la représentation. Eh bien ! il n’y eut pas un chat, ce fut la soirée la plus désastreuse de la tournée.

M. Renard pencha la tête un peu. Il jouait toujours avec son coupe-papier, machinalement, et machinalement aussi les mots quittaient ses lèvres, sans se presser, sans s’ordonner, sans se grouper en un beau paragraphe solide et nerveux, pareils simplement à des gouttes paresseuses qui tombent une à une d’un robinet entr’ouvert. Je crus démêler des regrets, des illusions perdues, des rêves trop pleurés, mais, une fois encore, je me trompais.

— Non, non, ne croyez point que j’en veuille