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l’heure où le roman était né et c’est à force de questions, les unes indifférentes, dont il ne se défendait pas, les autres précises qui l’effrayaient peu, je l’avoue, que je reconstituai toutes les phases de cette tendre, banale et émouvante histoire d’amour.

André Giron était depuis quelques mois à Dresde, tout entier consacré à sa tâche, quand la cour quitta, le 1er mai, le palais de Taschenberg pour la Prinzliche-Villa. À Wachwitz, la vie devint plus intime, presque familiale ; la princesse s’intéressait aux leçons du précepteur, il lui rendait compte, souvent elle y assistait. Elle prenait ses repas entre son mari et le maître de ses enfants. Elle était belle et intelligente. Le peuple entier l’adorait. Le prince héritier, au contraire, était borné et grossier et la fille du grand-duc de Toscane ne l’avait épousé que sur la prière et l’ordre de sa mère. Elle souffrait le martyre. L’histoire est simple : ils se virent chaque jour ; ce furent des causeries d’abord, qui, peu à peu, devinrent des confidences, puis des aveux. L amour fut souverain ; ils lui cédèrent.

Des mois passèrent. Des soupçons, cependant, naissaient : André Giron fut près de s’en aller de son propre gré. Le 14 novembre, il partit ; il ne partait pas pour toujours. Déjà la princesse avait résolu de le suivre. Le plan de la fuite était préparé : c’était l’époque où, chaque année, elle abandonne la Saxe pour Salzbourg : l’occasion était propice. André Giron gagne Bruxelles, y demeure un mois,