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peux vous dire combien j’étais seul dans le monde et combien je souffrais de cet isolement. Non seulement j’étais orphelin, et depuis longtemps, mais je n’avais aucun appui. J’essaie de vaincre cette dépression et, à ma majorité, je voyage en Suisse et en Italie. Tenez, je descends même à Genève dans cet hôtel. Je ne possédais aucune ressource. Je venais de refuser un legs, il me fallait trouver une position. On m’offrait celle-ci ; j’acceptai. J’étais exactement sous-précepteur (unterzieher), sous les ordres du gouverneur militaire, je recevais cent vingt-cinq marks d’appointements par mois, et j’avais droit à un mois de vacances par an. J’étais ravi. Mes deux élèves étaient les princes Chrétien et Georges. Je devais leur enseigner le français et, plus tard, les mathématiques. Le 3 janvier 1902, j’entrai en fonctions. »

Comme il allait continuer, un domestique frappa et déposa sur la table un volumineux courrier. Plusieurs lettres étaient destinées à la princesse. Il s’en fut les lui remettre. Les autres, il les ouvrit devant moi. L’une d’elles apportait les respectueuses félicitations d’un jeune homme et d’une jeune fille de Paris ; une autre, les vœux de bonheur d’un Saxon qui demandait un portrait de la princesse ; une autre renfermait la photographie d’une amie et, comme sous l’enchantement des souvenirs que toutes ces lettres éveillaient en son esprit, André Giron cessa de parler.

Aussi bien il avait fini de parler de lui et c’était d’elle qu’il aurait dû m’entretenir. Je touchais à