Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/299

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de mes appas. On ne voulut reconnaître ni ses talents, ni son courage. C’est dans de pitoyables soucis, dans les milles combinaisons qu’il fut obligé de faire pour pouvoir vivre, qu’il est devenu ce personnage ridicule aux yeux de tous, tandis que les vieillards parlent encore avec transport des succès de ton père, et le prennent pour point de comparaison quand ils veulent exprimer la beauté. Lorsque je te vois élevé noblement, libre de tous soucis, capable d’obtenir les plus hautes dignités, et que je pense au cousin, qui, tous les jours, aux huées des gamins, vient se dandiner devant ma fenêtre avec un regard louche qui voudrait être amoureux, et une démarche de coq se pavanant, et qui se trouve heureux de peigner mon chien chaque dimanche, alors je sens que ton père est vengé, et que c’est une belle couronne que j’ai portée sur sa tombe.

Ou bien, si je faisais plus encore pour achever le cousin ? si je l’épousais pour déranger toutes ses habitudes, et pour disperser sa collection d’armoiries ?

L’héritier du Majorat n’avait pas entendu toute cette révélation, autrement il aurait placé son interruption plus tôt.

— Ainsi, je ne suis noble que parce que j’ai été placé par fraude sur le sein d’une mère, s’écria-t-il tristement ; et où est le malheureux enfant qui a étéan