Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/238

Cette page a été validée par deux contributeurs.

m’accorder la moindre chose que je vous demanderai.

Frenel la blâma amicalement de douter ainsi de lui, mais elle, elle voyait que ce moment n’était pas éloigné.

Il prit congé de son amie avec cette persuasion commune à tous les hommes, qu’il ne faut pas croire aux prédictions, et partit en promettant un châle à la comtesse, et au comte, des graines de fleurs rares.

La vie quotidienne des trois associés se passait tranquillement à la campagne, régulière, sans être uniforme. Melück s’occupait des soins du ménage, c’était une tâche toute neuve pour elle, mais elle s’en tirait encore mieux que Mathilde, qui n’avait jamais appris à connaître les détails intimes et les besoins de la vie. Les gens de la maison se soumirent bien vite à ce coup d’œil rapide et sûr qui savait si bien mettre l’ordre dans toute chose. En même temps elle surveillait les enfants de la comtesse, qui avaient non-seulement une remarquable ressemblance, mais aussi une sympathie marquée avec elle, et cela, dès le moment de leur naissance. Souvent Melück se réjouissait, en plaisantant, d’avoir le bonheur d’être mère, sans avoir éprouvé les douleurs qui, depuis le premier péché, accompagnent les joies de la maternité ; et Mathilde trouvait les yeux orientaux et les longs cils de ses enfants si séduisants, qu’elle n’essayait pas de chercher