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gent, et son riche collier au cou de la musicienne faisaient l’admiration des deux vieux fous amoureux. Cette femme dansa, et ses pas leur parurent si voluptueux, qu’ils se jetèrent l’un et l’autre à son cou ; mais ces démonstrations firent tomber le masque, et les deux seigneurs furent très-désagréablement étonnés en voyant un visage inconnu et décrépit qui leur jeta un éclat de rire au nez.

— Où est Bella, misérables fripons ? s’écria la Nietken.

Pour toute réponse, un des musiciens lui envoya un coup de poing qui l’étendit à terre.

Les deux seigneurs voulurent sauter sur lui, mais les autres en eurent bien vite raison ; ils les saisirent, les garrottèrent, leur enlevèrent leur bourse, avec laquelle ils s’apprêtaient à payer la Nietken, fermèrent la porte à double tour, et s’en allèrent tranquillement, après avoir fait une bonne récolte dans leur soirée.

Bella, après avoir couru pendant une heure dans un sentier qu’elle savait mener à Gand, s’était arrêtée au pied d’un buisson pour prendre un peu de repos. Elle vit passer plusieurs troupes de gens ivres qui revenaient également de la kermesse, mais on ne l’aperçut pas ; quelques chiens seulement vinrent rôder autour d’elle.