Page:Achilles Essebac - Partenza-vers la beauté.djvu/98

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
90
PARTENZA…

Un arrêt dans une petite gare coquette, égarée parmi les fleurs. Les rares habitants aperçus montrent déjà une certaine indépendance dans leur costume d’une allure plus libre et plus fantaisiste. Je suis surpris pourtant de voir arriver sur moi une sorte de colosse tellement semblable aux légendaires bandits de la Calabre que d’abord je crois à une extravagance ; mais non, mon personnage est très naturel, et gravement s’installe auprès de moi : ses traits sont contractés comme à force de rire, mais n’en gardent dans les lignes que la grimace sans aucun air réjoui, au contraire ; ses cheveux en brousailles se mêlent à la barbe inculte qui remplit les sillons creusés sur sa face jusqu’autour des yeux, desquels elle s’écarte pour laisser échapper l’éclat de deux boules noires susceptibles d’être très douces, mais dans un encadrement plus calme ; mon homme a le visage d’un faune, à tel point que je cherche à l’extrémité de ses cuisses brutales les pattes velues du dieu joueur de flûte. Son costume conserve intactes les traditions très vieilles du pays. C’est, en moins élégant, le costume des jolis modèles de la place d’Espagne : courte veste, culotte bleue s’arrêtant aux jambes enveloppées de linges serrés dans de mauvaises courroies de cuir, qui leur donnent pourtant grand air, et, sur la tête, le feutre armé d’un jet de plumes belliqueuses ; ses épaules sont couvertes d’un manteau de drap épais, rugueux, d’une étoffe comme il ne s’en fait plus nulle part, tissée à la main sur un métier primitif. Tout le personnage tient de la muraille, de l’étable et de la bête à cornes dont il a