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PARTENZA…

voir Pise endormie pour jamais sur la plaine où lentement s’étire l’Arno paresseux, sinuant au pied du Dôme et de la Tour penchée, près de ce Campo Santo où les corps reposent en terre sainte, où les âmes reviennent pour voir, au clair de lune, les fresques immortelles de Benozzo Gozzoli et d’Orcagna… ce Campo Santo où la Mort, dit-on, se fait si calme qu’on la voit venir sans crainte si l’on a la certitude qu’elle vous couche là, pieusement, dans le Champ sacré, au bord de la ville où, si doucement, tout sommeille ou va s’endormir ; où tout est mort ou agonise paisiblement… Mais, ni les grands yeux noirs, ni les paysages bleus, ni le repos attirant de Pise ne me feront oublier Florence. Inutilement, demain, nous irons sur les crêtes des montagnes, devant les Alpes casquées d’argent sous la chevauchée caressante des nuages, de Menton à Nice. Monaco et les vapeurs mauves de l’Estérel en vain diront leurs chansons de sirènes au bord des vagues molles qui viennent sur les troncs des palmiers, parmi les roses, briser leurs lames d’émeraudes limpides en accrochant aux cactus épineux des dentelles d’écume. Tout reste ici. Tout le charme demeure jusqu’à cette extrême limite où la Tour du Palais-Vieux apparaît encore, pâle fantôme de bure à demi effacé, dans le bleu qui s’accumule entre elle et nous, et devient de plus en plus dense, de plus en plus compact, comme un voile léger dont la trame, sans cesse, s’accroît d’invisibles fils… C’est fini, Florence n’est plus pour nous !…