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PARTENZA…

Je descends très matin, impatient de connaître cette ville recouverte de la pourpre vieillotte de ses tuiles sur lesquelles tombe dru le soleil et s’épandent en remous métalliques les tintements joyeux des clochers ; cette Florence dont le passé fantastique chante à mes oreilles, dont les magnificences m’éblouissent et reprennent corps dans la soudaine réalité de la rue où se déroule un décor incomparable surpassant encore ce que j’avais osé rêver de plus séduisant et de plus beau.

Et je vois là cette Florence tout ensemble vigoureuse et pâle comme les fresques immortelles qu’ont semées à pleines mains, à plein génie les ouvriers de la Renaissance. Ses églises et ses palais dessinent leurs dômes et leurs terrasses dans l’air bleu en contours d’une netteté inouïe, dans l’ineffable clarté de ce grand jour qui la caresse, la baigne d’indéfinissables nuances de lumières et sur elle dépose la parure d’or du soleil. Elle est aussi belle que Rome, sévère et rigide, plus enlaçante que Naples aux molles étreintes. On sent que ce n’est pas la chair seulement qui va tressaillir de nobles jouissances, mais que l’esprit vient aussi se féconder aux sources mêmes du Beau et réclame sa part dans la fête des sens.

Sur l’Arno, voilà le Ponte-Vecchio, vieux et croulant, avec ses trois grandes baies au milieu que transperce la lumière ; triptyque improvisé où s’encadrent les montagnes bleutées qui font à Florence une ceinture toujours brillante au midi comme au septentrion.

C’est tout le XVe siècle, ses palais et ses campaniles