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LUC
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— Oh ! mon Dieu ! Monsieur Chérubin, vous avez été piqué par une énorme bête, là, au cou…

Et elle met son doigt fuselé sur le cou de Luc avec la peur de l’y poser trop et l’espoir de l’y laisser davantage… Tout le monde veut voir. Luc remonte le col de sa chemise, inquiet soudain. A-t-il un joli cou ce Luc ? tiède, pâle, que laisse voir en la nonchalance de sa molle retombée blanche, le parement douillet du col ouvert comme une fleur. Luc se défend. Une bête ? ah ! bien, cela lui est un peu égal par exemple !

— Voulez-vous laisser son cou tranquille… comtesse !

Nine s’occupe à remplir la théière d’argent à la bouilloire…

Julien a bien vu, lui, la succession des stigmates minuscules et roses symétriquement alignés dans la direction de l’oreille à l’épaule. Il ajoute pour qu’on laisse tranquille celui qui fut son ami :

— Lucet a raison ; ce n’est rien autre, belles dames, que le désir de taquiner Chérubin. Luc doit vous rappeler qu’il est parmi vous M. Aubry, et le cou ni les bras de Chérubin ne vous appartiennent… MM. vos maris ne le supporteraient pas !

Et celles qui protestent le plus se défendraient le moins si Chérubin laissait percer le désir de leurs mains blanches ou de leurs lèvres roses et ne mettait en interdit le cou joli que Nine, la nuit où sa jeune chair fut initiée, a marqué de sa joie…

Julien a bien vu, lui ; et son cœur se serre comme cette nuit quand, agenouillé sur les marches du petit temple, parmi la jonchée froide des feuilles odorantes,