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LUC
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embaumées de la jonchée des feuilles et des roses renouvelées dans le cabinet voisin, il rêve… Tous ces hommages dont aucun ne l’a touché : lettres, baisers, caresses insolentes, bravos, bijoux même et fleurs, que des mains inconnues faisaient déposer dans sa loge sans qu’aucune trace en dénonçât la provenance, l’origine, le donateur — rien n’a transperce son âme juvénile et remué son être tout neuf autant que le frôlement silencieux de Nine et l’affection muette de Julien.


Lourdement, du clocher, le quart de minuit roule sur les ardoises moussues de la nef… puis le silence’absolu s’étend à nouveau…

Luc s’agite de la chaise longue à son lit où des courtines de damas vieux rose encadrent les draps d’un tissu très beau à entre-deux de guipure ; des draps souples dont chaque pli douillet pénètre la chair comme de caresses… Il lui semble tout à coup que l’on vient de marcher… Il écoute… Ce sont des feuilles qui voltigent et doucement frôlent la fenêtre avant de s’abattre légères sur les racines noueuses des arbres…

Luc s’assoit sur le lit… Il passe l’un après l’autre ses doigts effilés entre les jours des guipures et compte les motifs brodés qui se répètent, comme un malade recompte sans cesse les piquets de fleurs en quinquonces sur le papier de sa chambre… Et le souvenir d’Edouard déshabillé auprès de lui tout à l’heure s’estompe en les poudres fines d’un pastel… Il n’y a vraiment guère de différence — et s’il en existe ne serait-elle pas toute à l’avantage de celui-ci ? — entre