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« C’est Achille et Hector ! » reprenait — on. Et personne de songeait à intervenir dans la querelle.

Le huguenot et le catholique avaient presque même taille ; tous deux grands, souples, lestes, vigoureux, tels que le peuvent être deux braves gars élevés dans la pleine liberté des champs, brûlés par le soleil, battus par la pluie, hâlés par le vent, accoutumés à braver la bise et la neige, à coucher sur la dure, à dormir à la belle étoile. L’un, blond avec des cheveux bouclés à reflets d’or tombant sur un front de marbre ; l’autre, brun avec une cri nière de cheveux noirs, dont les ondes luisantes assom brissaient les yeux sauvages et le teint basané ; M. de la Guerche, pareil à cet Endymion pour lequel une déesse descendit de l’Olympe ; M. de Chaufontaine, tel qu’un peintre de bataille aimerait à représenter le terrible maréchal de Montluc revêtu de son harnois de guerre. Tout naturellement, Armand-Louis commandait tous les petits protestants du pays ; Renaud avait sous ses ordres les catholiques de dix clochers voisins, et les deux généraux ne manquaient pas une occasion de pousser les armées rivales l’une contre l’autre. Leurs qualités diverses se faisaient voir dans ces mêlées : Renaud, prompt à l’attaque, toujours le premier et le plus avant, impétueux, hardi et loquace comme un héros d’Homère ; Armand —Louis, tenace, inflexible, rapide dans ses évolutions, et n’oubliant jamais, au plus fort de la mêlée, qu’il était capitaine. Il manoeuvrait ses jeunes soldats comme de vieilles bandes ; Renaud poussait droit devant lui et se fait au hasard, qu’il appe lait le dieu de la guerre, mais s’il comptait plus d’ennemis renversés, la victoire restait presque toujours à Armand Louis ; et le marquis, tout à coup isolé de ses régiments rompus et dispersés, était fait prisonnier sur le champ de bataille.

A quatorze ans, M. de la Guerche lisait dans le texte latin les Commentaires de César. M. de Chaufontaine, à quinze ans, se plongeait avec délices dans les étonnantes