Page:About - Les mariages de Paris, 1856.djvu/331

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’un interminable dîner auquel on avait convié tous les personnages des environs.

En attendant l’arrivée des convives, Gaston et Lucile se promenèrent au jardin en chapeau de paille, l’un vêtu de coutil blanc, l’autre habillée de barége rose. En passant à portée de l’usine, Gaston fut accosté par le régisseur qui le tenait en haute estime et qui lui demandait volontiers ses avis. Ils entrèrent tous trois dans un des ateliers, et l’on commença devant eux une expérience intéressante. Lorsque quatre heures sonnèrent à l’horloge de la fabrique, Lucile s’échappa pour aller à sa toilette, en disant à Gaston : « Vous avez le temps de voir la fin ; restez, je le veux ! » Il resta, et prit un si vif intérêt au spectacle qu’il mit la main à la besogne et se salit abominablement. À cinq heures il s’enfuit, les manches retroussées et les mains noires, et il donna juste au milieu d’un groupe d’invités qui se promenaient en grands atours. Quelqu’un le reconnut et l’appela par son nom. C’était l’ingénieur des salines de Dieuze, un de ses camarades de promotion. L’École polytechnique est, comme l’aristocratie du faubourg, un peu franc-maçonne : elle se retrouve partout. Gaston sauta au cou de son ami et l’embrassa sur les deux joues en tenant ses mains en l’air de peur de le noircir. Il y avait là trois ou quatre dames nobles qui s’étonnèrent un peu de voir un marquis fait comme un ramoneur et embrassant sur les deux joues un employé de la