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quoi nous as-tu servi ? Tu nous as donné cinquante-quatre misérables francs tous les mois, une paye de mercenaire ! Tu nous as nourris de pain noir et de fromage moisi dont les chiens n’auraient pas voulu, tandis que tu faisais fortune et que tu envoyais des navires chargés d’or à tous les banquiers étrangers. Qu’est-ce qui nous est revenu de nos victoires et de tout ce brave sang que nous avons versé dans la montagne ? Rien. Tu gardais tout pour toi, butin, dépouilles, et rançon des prisonniers ! Il est vrai que tu nous laissais les coups de baïonnette : c’est le seul profit dont tu n’aies jamais pris ta part. Depuis deux ans que je suis avec toi, j’ai reçu dans le dos quatorze blessures, et tu n’as pas seulement une cicatrice à nous montrer ! Si du moins tu avais su nous conduire ! Si tu avais choisi les bonnes occasions où il y a peu à risquer et beaucoup à prendre ! Mais tu nous as fait rosser par la ligne ; tu as été le bourreau de nos camarades ; tu nous as mis dans la gueule du loup ! Tu es donc bien pressé d’en finir et de prendre ta retraite ! Il te tarde bien de nous voir tous enterrés auprès de Vasile, que tu nous livres à ce milord maudit qui a jeté un sort sur nos plus braves soldats ! Mais n’espère pas te dérober à notre vengeance. Je sais pourquoi tu veux qu’il s’en aille : il a payé sa rançon. Mais que veux-tu faire de cet argent ? L’emporteras-tu dans l’autre monde ? Tu es bien malade, mon pauvre Hadgi-Stavros. Le milord ne t’a pas épargné, tu vas mourir aussi, et c’est bien fait ! Mes amis, nous sommes nos maîtres. Nous n’obéirons plus à personne, nous ferons ce qui nous plaira, nous mangerons ce qu’il y a de meilleur, nous boirons tout le vin d’Égine, nous brû-