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L’ASSASSIN

MADAME PÉRARD, passe devant lui et gagne l’avant-scène de droite.

Voilà mon état civil bien établi, comme dirait l’autre. Et vous, monsieur, me ferez-vous l’honneur de me dire qui vous êtes ?…

ALFRED, à l’avant-scène, au milieu.

Moi, madame ? Oh ! pas grand’chose ! Je suis l’imprévu ! C’est moi qu’on attend, lorsqu’on n’attend personne. C’est moi qui entre dans la maison lorsqu’on oublie de fermer la porte ou la fenêtre. On ne me connaît pas, et pourtant on me reconnaît, comme si l’on m’avait déjà rencontré au coin d’un bois, ou d’un rêve. Du reste, trente ans, peu d’argent, énormément d’avenir, médiocrement d’esprit, et du cœur à tout casser. (Montrant la tasse qui est sur le dressoir.) Tenez ! voilà mon ouvrage de ce matin !

MADAME PÉRARD, vient à l’avant-scène au milieu, à droite d’Alfred.

J’espère, monsieur, que vous vous en tiendrez là, et que vous ne ferez pas d’autres ravages. L’accueil que je vous ai fait vous prouve que je ne suis pas trop provinciale pour une femme de province, mais vous vous tromperiez de tout si vous me preniez pour une héroïne de roman. Si je vous disais que vous me faites horreur et que je vous déteste à première vue, je mentirais assurément ; mais si vous supposez qu’il a suffi d’un regard en coulisse et de quelques mots bien dits pour me tourner la tête, je serais la première à rire de votre fatuité… Je ne suis pas libre, monsieur !

ALFRED, avec épouvante.

Mariée !

MADAME PÉRARD

Non, mais engagée assez publiquement pour qu’une rupture soit impossible. Personne n’ignore à dix lieues à