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CAUSERIES.

la fantaisie, ou même à la caricature. Le public des premières représentations est sorti tout froissé, comme s’il avait passé par les mains d’un lutteur émérite.

C’est un rude lutteur, en effet, ce digne fils du grand et bon Alexandre Dumas. Aucun homme mieux que lui ne connaît le fort et le faible de la France contemporaine. Il a traité successivement, et toujours en maître, toutes les questions vivantes, vibrantes et palpitantes de son temps : la haute prostitution qui nous déborde, l’adultère élégant qui va bien, le demi-monde, cette invasion barbare et séduisante qui menace le monde régulier, la question d’argent, qui résume toutes les autres, le père prodigue (on en a vu beaucoup cette année) et le fils naturel (on en compte vingt-huit pour cent dans les naissances de Paris !). Le grand artiste ajoute à cette série une nouvelle étude, aussi nouvelle, aussi curieuse, aussi intéressante, aussi profonde que toutes les autres. Il met en scène un type qui devient de jour en jour moins rare parmi nous. C’est l’homme qui a beaucoup connu Marguerite Gautier et s’est aperçu qu’il faut se ruiner pour elle (ce qui est bête) ou la ruiner pour soi, ce qui est honteux. Il a obtenu les bonnes grâces de Diane de Lys, et il a su tirer son épingle du jeu au moment où le mari allait le tuer comme un chien. Il ne veut pas finir comme le père prodigue ; il n’aimerait pas