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airs connus, il improvisa un morceau de circonstance sur son propre malheur :

Riwall zo en toull ar bleiz
Birviken, birviken,
Riwall zo en toull ar bleiz
Biken na welo an deiz.



De grosses larmes lui coulaient le long des joues. Il était las, las, et bientôt ses bras vaincus tomberaient. Alors, il n’aurait plus qu’à s’étendre pour mourir et le loup le mangerait (il n’avait pas ouï parler de la chèvre de M. Seguin, et pour cause, le pôvre !). Comme elle était déjà loin, la noce mirifique de Naïk aux cheveux d’or ! Et le bombarde Torr-Rëor, que dirait-il, en apprenant la fatale nouvelle ? Kénavo, chaumière aimée, parents, amis ! L’âme de Riwall gémissait dans la voix du biniou, pleurait les deux jours révolus.

Riwall zo en toull ar bleiz,
Birviken na welo an deiz.



Adieu l’enchantement des pardons enrubannés de Cornouaille ! adieu, la douceur des assemblées par les soirs enivrants de mai ! Ah ! que la vie est belle et que le rire des coquettes filles est clair aux jours de « marradek ». Oh ! la tendresse mouillée des bosquets au printemps embaumé de fleurs, plein d’abeilles et de merles en délire ! Quiétude heureuse des longues veillées, flip adorable, festins plantureux, Riwall le Sonneur vous quitterait-il à jamais ?

Et Riwall le Sonneur, en larmes, des larmes silencieuses et lourdes, chantait dans son biniou sa vie et sa mort.

Birvi, birviken !