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la Déclaration des droits de la femme et l’Admission des femmes au droit de cité, est ainsi conçu : « Déroger à l’usage gothique qui exclut les femmes de nos assemblées politiques. En vain, quelques pédants ignares et dédaigneux souriront de pitié à cette proposition… On a remarqué que des points de controverse longtemps agités par des hommes étaient devenus clairs et simples par la sagacité des femmes.

« L’Europe donne des régences et des royaumes aux femmes. Par quelle contradiction ne leur est-il pas permis de discuter elles-mêmes leurs propres intérêts ? » Et le marquis de Villette conclut en demandant l’attribution des droits politiques « à toute jeune fille ou femme âgée de vingt-cinq ans et possédant des propriétés ».

Cette proposition, modérée en somme, rappelle celle de Condorcet dans son étude sur les assemblées provinciales. La coïncidence n’a rien d’étonnant d’ailleurs si l’on songe à la parenté spirituelle qui unissait les deux disciples de Voltaire. Il ne s’agit pour l’un et l’autre que du vote des femmes chefs de famille et qui ont des intérêts matériels à défendre. Mais le principe n’en est pas moins nettement posé.

iv. Les femmes et la reconstitution nationale

Quelques-uns, d’ailleurs, attendent de la libération des femmes, non seulement la réparation d’une injustice, mais de sérieux avantages pour la nation.

Les philosophes ont montré que les femmes ont une décisive influence sur les mœurs — sur les mœurs politiques comme sur les mœurs privées — et l’expérience du dernier siècle a confirmé leurs vues.

Que les femmes donc soient plus instruites, mieux pénétrées de leurs devoirs civiques et du sentiment intime de leur dignité et elles formeront, dans le respect des institutions établies par l’Assemblée, les générations nouvelles ; elles assainiront l’atmosphère politique, elles feront un pays plus prospère et plus uni. « La voix d’un sexe puissant, dit l’une des proclamations féministes, doit rallier tous les cœurs sous les drapeaux du patriotisme. Les femmes doivent excommunier les suppôts du despotisme ; les femmes mariées, les mères doivent inspirer l’amour de la patrie, unir les volontés pour la conquête de la liberté, prêcher le désintéressement et la concorde, refuser leurs caresses aux prévaricateurs[1]. »

  1. De l’influence des femmes.