Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/348

Cette page n’a pas encore été corrigée

Commentaire algébrique et d’une Histoire sommaire de l’astronomie, contribuent pour une très large part à répandre le Newtonianisme. Mme  du Chatelet, bien que la postérité ne puisse ratifier ce jugement, puisqu’elle s’est contentée de faire connaître les systèmes de ses illustres maîtres et n’a, elle, rien inventé, fit en son temps figure de génie. Voltaire contribua pour beaucoup à cette réputation, il proclama que jamais « femme ne fut aussi savante », et lui adresse ce dithyrambe :

… Comment avez-vous pu dans un âge encore tendre.
Malgré les vains plaisirs, cet écueil des beaux jours,
Prendre un vol si hardi, prendre un si vaste cours.
Monter après Newton dans cette route obscure
Du Labyrinthe immense où se perd la nature ?

Quelques autres femmes, assez rares, la culture scientifique étant moins répandue chez les femmes que la culture littéraire, marchèrent de loin sur les traces de Mme  du Chatelet.

Mme  Lepaute, femme d’un savant horloger de Béziers, membre de l’Académie des sciences de sa ville natale, communique à l’Académie de Béziers des Mémoires d’astronomie, écrit une Table des longueurs de Pendules, et dresse la carte de l’éclipse annulaire du 1er  avril 1764, Mme  du Coudray, cette sage-femme que nous avons vu parcourir la France enseignant aux sages-femmes les principes rationnels de l’art des accouchements, condensa son expérience dans un Abrégé de l’art des accouchements qui fit autorité.

On vit, surtout à la fin du siècle, des femmes de la noblesse et de la bourgeoisie porter un amour désintéressé à la science, sans chercher à acquérir la notoriété par des œuvres personnelles, réunir de belles collections d’histoire naturelle qu’elles mettaient avec orgueil à la disposition des savants. La femme d’un parlementaire de Bordeaux, Mme  Duplessy, qui eut, nous l’avons vu, un salon très fréquenté, avait formé l’un des cabinets d’histoire naturelle les plus beaux d’Europe. On venait de fort loin voir ses oiseaux des îles, sa collection de coquillages, ses squelettes et les innombrables appareils de physique ou de chimie dont elle se servait pour ses expériences.

Bien d’autres femmes de la capitale ou des provinces firent de même. Vienne une découverte scientifique, une nouvelle méthode médicale, les femmes sont parmi les plus ardentes à les adopter, à les répandre.

Elles se passionnent pour Montgolfier et se pressent nombreuses à ses expériences.