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gouvernement, mais que cette influence fut en tout comparable à celle d’un premier ministre, donnant à la politique générale son orientation et imposant lorsqu’il le fallut et dans la mesure où de trop puissants intérêts contraires ne s’y opposèrent pas, ses vues personnelles. Nulle favorite dans l’histoire n’a joué un rôle aussi important.

Nulle autre femme après elle n’eut une influence comparable.

On peut passer sous silence, lorsqu’il s’agit de politique personnelle féminine, Mme du Barry. Celle-ci, préoccupée seulement de briller et de plaire, n’eut de politique qu’à son corps défendant. Elle ne fut, dans les changements qui marquèrent la fin du règne de Louis XV, que l’instrument demi-inconscient du parti dévot. Et lorsque, grâce à elle, le triumvirat eut été appelé au pouvoir, elle le laissa, sans opposition ni conseils, exercer la politique qui lui plut.

Mais l’avènement de Louis XVI est considéré comme l’avènement de la politique féminine. Et le règne de Louis XVI c’est pour beaucoup d’historiens, le règne de Marie-Antoinettev.

Jusqu’à quel point la reine en effet a-t-elle, avant la Révolution, influé sur la marche des affaires publiques ? Eut-elle une politique personnelle et dans quelle mesure réussit-elle à l’imposer ? C’est ce que nous devons essayer de déterminer.

Il importe avant tout de distinguer des époques.

Pendant toute la première partie du règne de Louis XVI, au moins jusqu’à la chute de Necker, la reine n’exerça à peu près aucune influence ou cette influence ne fut qu’occasionnelle. Lorsqu’elle intervint, ce ne fut que pour faire triompher les idées qui lui étaient suggérées, soit par le parti de Choiseul, soit par la cour de Vienne, et ce ne fut pas toujours avec succès.

Après la naissance de Madame Royale et du dauphin, son influence grandit et elle intervint davantage dans la politique. Ses vues sont alors ce qu’elles seront pendant la période révolutionnaire. Il ne semble pas cependant que, du moins jusqu’en 1789, elle ait exercé une action suivie ni qu’elle ait eu alors, comme par la suite, une influence déterminante sur les événements.

Arrivée très jeune à la Cour et sous le patronage du duc de Choiseul, Marie-Antoinette, reconnaissante, essaye, dès l’avènement du nouveau roi, de faire appeler au ministère l’exilé de Chante-