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l’issue du repas, donne la parole aux orateurs qui discuteront sur les affaires publiques. La loi Crétoise eût été bien inconséquente si elle n’eût pas permis aux femmes de donner leur avis au cours de ces délibérations où elles assistaient et que l’une d’entre elles présidait.

Sapho et Aspasie. — Mais c’est la civilisation ionienne, non la dorienne, qui fit la Grèce classique ; chez les Ioniens et dans tout le cortège d’Athènes, l’assujettissement de la femme prévalut si bien qu’il a pu apparaître, aux modernes, comme la loi du monde hellénique tout entier.

Contre cette loi, d’ailleurs, bien des rebelles se sont insurgées. En Éolie, dans l’île heureuse de Lesbos, apparaît comme en une brume lumineuse qui laisse apercevoir la silhouette sans permettre de distinguer les traits, la grande et énigmatique figure de Sapho. Épouse vertueuse ou courtisane ? Préoccupée de faire des femmes les égales de l’homme par l’éducation artistique et la connaissance du beau, ou ne voyant en ses compagnes que les manifestations terrestres de l’ardente Aphrodite, dont le souffle brûlant la laisse sans couleur et sans force ? Que fut véritablement Sapho ?

L’antiquité elle-même hésite.

La Grèce de Périclès, la Rome impériale ont connu des amants passionnés et d’injurieux détracteurs de la grande poétesse. Au dix-neuvième siècle, les érudits ont à nouveau évoqué à leur tribunal le procès de Sapho… Aucun verdict d’ailleurs ne pourra être rendu en connaissance de cause ; car si