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HISTOIRE DU FÉMINISME

qui nul réformateur n’a aboli l’ancien droit de la mère.

Voici, en effet, autour du monde gréco-romain, toute une ceinture de peuples féministes. En Asie Mineure s’est conservé le souvenir de ces Hittites qui, s’ils ne sont pas, comme le veut le savant allemand, des Amazones travesties, ont du moins connu de véritables Amazones. Prêtresse et reine, la femme, nous l’avons vu, gouverne même du vivant du roi. Pourquoi ne serait-elle pas, comme tout souverain, un chef de guerre ? Voici en effet, surgissant des ruines de Bogbaz Keui, le portrait d’une Amazone authentique. Certes, pour qui se représente Camille ou Penthésilée avec leur taille élancée, leur port de déesse et la grâce fière de leur adorable visage, la désillusion est cruelle. Trapue, mamelue, les traits durs, la chevelure pendant disgracieusement sur les épaules, l’œil cruel et le nez busqué d’un roi d’Assur, déjà d’un âge trop certain, la farouche virago, dont la cotte de mailles sangle la forte corpulence et qui brandit la double hache, n’a rien d’une héroïne de galante épopée. Elle est d’autant plus véridique et le témoignage peu flatteur de la pierre ne permet pas de mettre en doute qu’il y eut chez les Hittites des femmes guerrières, voire généraux. Eût-on songé à transmettre à la postérité les traits d’un simple soldat ?

Chez les peuples du brumeux septentrion, Scythes, Cimmériens, les femmes aussi montent à cheval, accompagnent les hommes dans leurs expéditions, souvent les commandent. N’est-ce pas contre les invincibles escadrons de la reine des Massagètes, Thomyris, que la fortune du grand Cyrus vint se