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ses retours offensifs. Mais Marcelle Tinayre, tout comme Marcel Prévost, nous montre l’héroïne de la Rebelle, Josanne, esprit supérieur, conscience ferme et qui dès longtemps a pesé à leur valeur les serments de l’homme, s’abandonnant délicieusement à l’amour. Comme la Vierge forte, la Rebelle est vaincue.

Les héroïnes de Colette Yver ne sont plus seules et en lutte contre la société ; elles ont réussi à se faire accepter de la société et s’y taillent une place à leur mesure. Au moment où apparaissent Princesses de Science et Cervelines, la doctoresse, l’avocate sont des êtres d’exception encore, mais qui ne se séparent plus du monde et qui acceptent, sinon le joug masculin, du moins la collaboration masculine dans le mariage. Pour Colette Yver, d’ailleurs, l’expérience est malheureuse, les intellectuelles, épouses d’intellectuels, n’ont fait que changer le maître despotique pour le rival jaloux.

Ainsi, lorsque les romanciers, hommes ou femmes, nous montrent le féminisme réalisé, lorsqu’ils ne vont pas, comme Albert Cim, jusqu’à représenter les Émancipées sous les espèces de grotesques bas-bleus ou de viragos dévergondées, ils l’aperçoivent en lutte contre la société, la nature même et les plus nécessaires sentiments humains. C’est donc sur une impression défavorable, un sentiment d’hostilité ou du moins d’inquiétude devant les nouvelles doctrines que le lecteur, la lectrice ont fermé ces livres. Les écrivains en effet sont le miroir fidèle d’une opinion qu’ils suivent plus qu’ils ne dirigent. Et au début du vingtième siècle encore le féminisme, non plus que le socialisme, n’est accepté par l’opinion