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la passion, revendique pour la femme la liberté. « Femmes, que je vous plains ! » s’écrie-t-il. Et après avoir tracé un tableau poignant de sa servitude où chez toutes les nations elles languissent, il s’écrie : « Dans toutes les coutumes, la cruauté des lois civiles s’est réunie, contre les femmes, à la cruauté de la nature. Elles ont été traitées comme des êtres imbéciles. Nulle sorte de vexation que, chez les peuples policés, l’homme ne puisse exercer impunément contre sa femme. » Par le mariage l’homme s’est arrogé sur la femme un droit injuste de propriété. Qu’il ne se plaigne pas si, comme il le semble à l’observateur averti, les femmes font une sorte de « ligue secrète pour résister à la tyrannie de l’homme ». Intelligente autant que l’homme, mais d’une façon différente, plus près du mystère de la nature par son génie intuitif, la femme mérite d’être libre, affranchie. À vrai dire, Diderot ne conçoit pas l’affranchissement des femmes comme le concevront Condorcet ou Stuart Mill. Il les place en dehors et au-dessus de la société, sur un plan différent, et ne leur accorde aucune influence sur la marche des affaires publiques. N’importe ! il veut du moins faire tomber leurs chaînes.

Étudiant objectivement les coutumes de tous les peuples, Montesqieu est amené à constater que telle nation de l’antiquité, telle peuplade sauvage accorde à la femme des droits, des privilèges en contradiction absolue avec l’idée que les Français ou les Espagnols se font des devoirs féminins. L’Angleterre, la Moscovie, l’Inde ont maintes fois déjà porté la femme au trône. L’Égypte antique lui donnait le gouvernement absolu de son ménage, et