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minure dont la réputation fait pâlir celle des enlumineurs ! … sans compter certaine poétesse que sa modestie lui interdit de nommer.

Et voici Christine arrivée au point critique. Pourquoi, doit-on se demander en bonne logique, pourquoi, si la femme est l’égale de l’homme, pourquoi ne tient-elle pas la même place que lui dans le gouvernement ? « Parce qu’elle n’a pas la force et que d’ailleurs il n’est pas nécessaire que les femmes prennent les offices des hommes. » Concession plus apparente que réelle aux préjugés du temps et démentie par toute la suite logique de l’argumentation. Christine de Pisan s’est posé la question. Elle l’a, dans son for intérieur, résolue.

La raison la mène, et par les mêmes voies, jusqu’au même point où elle conduira Olympe de Gouges ou Condorcet. Elle est bien l’une des plus grandes apôtres de l’émancipation de la femme et, en même temps, l’une des premières émancipées.

La Renaissance et le féminisme. — Au quatorzième siècle, au quinzième siècle, toute voix qui s’élève en faveur des femmes doit rester isolée ; si elle ne plane sur les ailes du mysticisme, l’idée de l’émancipation ne peut trouver de défenseurs.

Il en est tout autrement lorsque le grand souffle de la Renaissance a rénové les esprits, lorsque, sur la terre élargie par Vasco et Colomb, embellie par la résurrection des dieux antiques, de hardis réformateurs peinent, sans crainte du bûcher, à libérer la pensée pour jeter les bases d’un monde nouveau.