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leudes indomptables ; Radegonde, âme d’élite d’une délicatesse toute moderne et qui semble déjà l’héroïne, plus tragique, de Maison de poupée. N’est-elle pas une des premières rebelles, cette princesse qui, rebutée par la grossièreté de son mari, Clotaire Ier se réfugie en un cloître qui, sous sa direction intelligente, est en même temps un hôpital et un salon et d’où s’échappent, dépaysées dans un siècle barbare, vraies tourterelles dans le nid des vautours, les madrigaux de son adorateur platonique, l’Italien Fortunat ? Figures d’exception et qui n’empêchent la femme, comme tous les faibles, d’avoir été alors opprimée, foulée.

Mais dans la barbarie germanique était en germe la féodalité, et dans celle-ci l’affranchissement de la femme. Au douzième siècle, une nouvelle société est formée, aussi différente de la société franque que celle-ci de la société romaine. Elle repose sur ces deux principes : morcellement de l’autorité publique ; confusion de la propriété et de la souveraineté. Chacun des innombrables États Indépendants qui se partagent par exemple le royaume de France est considéré (qu’il s’agisse de l’immense duché d’Aquitaine ou d’une minuscule seigneurie) comme un domaine particulier. Le possesseur de ce domaine est, sur ses terres, administrateur, juge, percepteur, général et transmet, dans des conditions fixées par le droit civil, ses domaines avec tous leurs droits souverains à ses enfants.

De cette propriété féodale, les femmes d’abord furent exclues. Au douzième siècle, elles peuvent l’acquérir à peu près dans les mêmes conditions que les hommes et, dès lors, en exercer tous les droits.