Page:Abelard Heloise Cousin - Lettres II.djvu/216

Cette page n’a pas encore été corrigée

QUESTIONS DHELOlSE ET RÉPONSES D’ABÉLARD. 455

repentir, n’obtiendrait pas le pardon. Mais, d’après la parole du Seigneur, nous croyons que tous ceux qui se comportent ainsi ont si bien irrité l’Es- prit de Dieu, qu’obstinément voués à leur malice, ils se sont mis en dehors de toute grâce. Cette grâce manifeste de Dieu, qui se révèle dans le Christ par des miracles, saint Luc la désigne plus haut par le doigt de Dieu, dans ces paroles du Seigneur : « Si, avec le doigt de Dieu, je chasse les démons. » On dit, en effet, la droite ou le bras du Fils de Dieu, et dans cette droite, le doigt marque évidemment l’œuvre du Saint-Esprit. C’est le doigt, en effet, qui nous sert à l’indication des objets matériels. Le Seigneur dit donc le doigt du Saint-Esprit, lorsqu’il veut montrer sa grâce par quelque effet, en sorte qu’on y puisse reconnaître l’œuvre de Dieu, encore que quel- ques-uns, comme les Pharisiens, la blasphèment par envie. Et voilà comment le péché de blasphème envers le Saint-Esprit, par qui s’obtient la rémission des péchés, est lui-même éternellement irrémissible.

Quant à ces mots : « Quiconque aura parlé contre le Fils de l’homme, son péché lui sera remis, • il faut entendre par là qu’aucun de ceux qui, non par malice, comme nous l’avons dit, mais par erreur, auront porté atteinte à la gloire du Christ, ne sera condamné pour cela, cette ignorance insur- montable les assimilant à ceux pour lesquels le Seigneur, dans sa Passion, lui ou Etienne, a prié. En effet, il convient à la piété et à la raison que tous ceux qui reconnaissent, suivant la loi naturelle, un Dieu créateur et rému- nérateur, qui l’honorent et s’attachent à ne point l’offenser par un effet de leur volonté, laquelle seule constitue le péché ; il convient, dis-je, de penser qu’ils ne sont pas damnés, et de demander que ce qui leur est nécessaire d’apprendre pour être sauvés leur soit révélé par Dieu avant la fin de leur vie, soit par une inspiration, soit par quelque autre moyen direct, tel que celui qui amena, dit-on, Corneille à croire en Notre-Seigneur et à recevoir le baptême. C’est ce que signifie évidemment cette parole : i Si notre cœur ne nous reproche rien, ayons confiance en Dieu, t Et quand le Seigneur dit : i 11 n’est personne qui ait jamais eu un plus grand amour que celui qui donne sa vie pour les siens, » cela veut dire qu’il ne faut poiut douter de ceux qui, dans leur zèle pour la Loi, bien qu’ils n’aient pas connu le Christ, ont le courage de mourir pour Dieu. Car il est facile à Dieu d’inspirer à de tels hommes ce qu’ils doivent croire du Christ, avant que leur âme quitte le corps, pour qu’ils ne passent pas hors de cette vie en état d’infidélité.

QUATOftZlftn QUESTION d’hÉLOÏSB.

D’où vient que le’ Seigneur, mettant en parallèle, pour ainsi dire, le cœur des fidèles et comptant les mérites qui peuvent obtenir la béatitude.