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QUESTIONS D’HÉLOlSB ET RÉPONSES D’ABÉLARD. 437

calice, non du second qu’il dit à ses apôtres : « Prenez et partagez-vous. » Nous nous partageons, en effet, le calice du Christ, lorsque nous l’imitons dans les diverses supplices de la Passion. Dans le sacrifice lui-même, il n’y a pas de part différente : c’est la tête seule qui est offerte, non pas les membres, et l’obiation est accomplie par les mauvais comme par les bons prêtres, suivant la vertu des divines paroles : t Recevez ce calice que vous vous partagerez ensuite, parce que je ne boirai plus du jus de la vigne, » — c’est-à-dire, parce que je ne célébrerai plus le sacrifice de U passion, — jusqu’à ce que le règne de Dieu soit arrivé, » autrement dit, jusqu’à ce que la vie céleste, dans laquelle règne le Seigneur seul, et non plus le péché, soit ouverte par ma Passion aux fidèles.

C’est avec raison qu’il a fait passer le calice de l’imitation avant le calice du sacrifice, parce que ceux-là seuls sont dignes de prendre part à la table du Seigneur, qui sont prêts à imiter sa Passion et à porter sa croix. C’est de là qu’il est écrit : « Vous avez pris place à une grande table ; sachez qu’il faut vous préparer en conséquence, t C’est en donnant le Nouveau et non l’Ancien Testament, et en recevant le pain aussi bien que le vin, que le Seigneur rend grâces. U a voulu indiquer par là, qu’alors seulement avait été accompli ce qui avait été annoncé, et qu’il faut glorifier Dieu plutôt de la réalité que de l’ombre. Toutefois, il dit qu’il avait désiré célébrer la Pàque avec ses disciples suivant l’ancienne loi, afin qu’ils ne fussent pas exposés à croire, en commençant par lui les nouveaux sacrements, que les anciens ne leur avaient pas été donnés par Dieu. Puis les anciens sacrements convenaient aux anciens ; le Seigneur devait donc célébrer avec eux ce qui évidemment s’accordait le mieux avec leur âge. Par ce désir, il voulait marquer que cette fête était celle qui répondait le mieux à leur ancienneté ; et pour les engager, pour les inviter à passer de la forme ancienne à la nouvelle, il fit immédiatement suivre l’Ancien Testa- ment du Nouveau, afin de consacrer, pour ainsi dire, le lien de l’un à l’autre. Il voulait que, dépouillant leur ancienne forme, ils passassent du royaume du péché dans le royaume de Dieu, et suivant dès lors, dans la forme de l’ancienne Pàque, non plus la lettre, mais l’esprit, ils se laissassent porter de l’ancienneté de la lettre à la nouveauté de l’esprit. C’est ce qu’il faut entendre par ceci, que le Seigneur célébra la Pàque avec eux suivant l’ancienne loi et institua la nouvelle, l’ancienne figurant ce qui, suivant la foi, s’accomplit dans la nouvelle.

Aussi après la résurrection remontc-t-il tout d’abord jusqu’à Moïse, et s’appuie-t-il sur l’eusemble des saintes Écritures pour convertir l’ancien sacrement en nouveau : de l’un il tire l’autre par interprétation, enferme, pour ainsi dire, la roue dans la roue, et à l’eau de la loi substitue le vin de l’Évangile. Il mange avec nous l’ancienne Pàque changée en la nouvelle, c’est-à-dire que nous le restaurons, nous le charmons, eu prenant la Pàque ; comme nous a vous été mystiquement instruits à le recevoir, en mangeant de