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tères, et ils célèbrent des offices de nuit, comme nous avons coutume de le faire. »

C’est aussi à l’éloge de la philosophie chrétienne, c’est-à-dire de la vie monastique, ce que dit l’Histoire Tripartite au sujet de ce genre de vie embrassé par les femmes comme par les hommes. On y lit, en effet, au chapitre xi du livre Ier : « les chefs de cette éminente philosophie furent, au témoignage de quelques-uns, le prophète Élie et Jean-Baptiste. » Philon le Pythagoricien rapporte de son côté que, de son temps, des Hébreux d’un rare mérite se réunissaient dans une maison de campagne bâtie aux environs de l’étang Maria, sur une colline, et qu’ils philosophaient. Ce qu’il fait connaître de leur demeure, et de leur nourriture et de leurs entretiens est tout à fait conforme à ce que nous voyons aujourd’hui chez les moines d’Égypte. D’après lui, ces hommes ne mangeaient jamais avant le coucher du soleil, s’abstenaient de vin et de viande, vivaient de pain, de sel, d’hysope et d’eau ; et des femmes vierges et déjà parvenues à la vieillesse, qui avaient renoncé d’elles-mêmes au mariage, par amour pour la philosophie, habitaient avec eux.

Tel est encore le témoignage que saint Jérôme, dans son livre des Hommes illustres, au chapitre viii, rend au sujet de saint Marc et de son Église. « Saint Marc, qui, le premier, annonça le Christ à Alexandrie, y fonda, dit-il, une église telle par la pureté de sa doctrine et la chasteté de ses mœurs, qu’elle força tous les sectateurs du Christ à imiter son exemple. Enfin, Philon, le plus éloquent des Juifs, voyant que la première Église d’Alexandrie judaisait encore, écrivit un ouvrage à la louange de sa nation sur la conversion des juifs ; et de même que saint Luc rapporte que les chrétiens de Jérusalem avaient tout en commun, de même il raconte ce qui se passa sous ses yeux dans l’Église d’Alexandrie dirigée par saint Marc. » Saint Jérôme dit encore, chapitre xi : « Philon le Juif, né à Alexandrie d’une famille de prêtres, est mis par nous au rang des écrivains ecclésiastiques, parce que, dans le livre qu’il a composé sur la première Église d’Alexandrie, fondée par l’évangéliste Marc, il s’étend sur l’éloge de nos frères, et fait connaître qu’il y en avait beaucoup d’autres dans un grand nombre de provinces, et que les maisons qu’ils habitaient s’appelaient monastères. »

Il est donc évident que c’est ce genre de société des premiers chrétiens que les moines d’aujourd’hui se proposent pour modèle et cherchent à reproduire, lorsqu’ils se donnent pour règle de ne rien posséder, de n’avoir parmi eux ni riches ni pauvres, de distribuer leur patrimoine aux malheureux, de se livrer à la prière, au chant des psaumes, à la prédication et à la continence ; et tels furent, en effet, au rapport de saint Luc, les premiers croyants de Jérusalem.

III. Feuilletons l’Ancien Testament, et nous y trouverons qu’en tout ce qui concerne Dieu et les actes particuliers de la religion, les femmes n’ont jamais été séparées des hommes. Non-seulement elles chantaient, mais elles