Page:Abbadie - L’Art de se connaitre soi-meme.djvu/145

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
117
connoître Soy-meme.

possibilité ou ils se trouvent d’en étendre les limites, & leur fait régarder la mort avec plus d’horreur, par l’impossibilité ou ils se trouvent de l’éviter. Mais si la sagesse de Dieu avoit imposée aux hommes la necessité de vivre, comme elle leur a imposée la necessité de mourir, on peut presques assurer qu’avec le temps ils s’affligeroient de leur immortalité, comme ils s’affligent d’être mortels. La necessité de mourir leur fait faire plus d’attention aux agrémens de la vie, qu’aux maux dont elle est traversée. Mais alors la necessité de vivre leur feroit faire une plus grande attention aux maux de la vie qu’à ses agrémens.

Nôtre ame doit assûrément à l’accoûtumance & à ses préjugés une bonne partie de la répugnance qu’elle a à quitter le corps. Pour le voir il ne faut que faire reflexion sur sa vie passée, en ramasser tous les agrémens, & se demander à soy-même, si tout cela vaut la peine que l’on regrette le passé. Que s’il plaisoit à l’Auteur de la nature, de faire d’un côté trés distinctement connoî-