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connoître Soy-meme.

sans hyperbole à cet esprit que s’il a perdu quelque chose, c’est la vie & non pas la mort à laquelle il doit s’en prendre. La vie luy a fait perdre beaucoup de choses précieuses, sa sainteté, les sentimens de l’amour de Dieu &c. Et ne luy a donné pour son dédommagement, que des apparences : mais la mort le dédommagera avantageusement pourveu qu’il meure au Seigneur.

Nous perdons tous nos cinq Sens par la mort, sur quoy l’amour propre trouve, que si c’est une grande affliction à un homme de perdre la veüe, ou l’ouïe, c’en est une plus grande de perdre tous ses sens à la fois : mais l’amour propre se méprend, non seulement nous ne perdons point nos cinq sens : mais il est certain que nous n’en perdons pas un seul réellement. Nous ne devenons point incapables de voir, d’oüir & de parler. Ce n’est pas la nature des choses : mais la libre institution de Dieu qui avoit attaché ces sentimens de nôtre ame aux organes de nôtre corps, avec lesquels ils n’avoient pas naturellement plus de raport qu’avec la matie-