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DOUZE ANS DE SÉJOUR

frapper dessus pour l’enfoncer en terre sans le faire éclater. Cette espèce de pieu porte à sa partie supérieure trois ou quatre crampons ; fiché en terre, il sert à suspendre les armes, à une halte ou sous la tente. Ceux qui conduisent les bêtes de somme, les bûcherons, les coupeurs d’herbe, et tous les valets d’armée sont munis de cet instrument, qui, au camp, sert à suspendre les armes ou les harnais, et qui sert d’avant-pieu pour construire les huttes, dresser les tentes, creuser les rigoles, planter les piquets d’attache des chevaux, découvrir les silos cachés dans la campagne ou creuser la fosse pour les morts. Il se trouve dans toutes les maisons et semble être identique à celui que Moïse recommandait aux Hébreux, pour creuser la terre et y déposer tout ce qui pouvait nuire à la salubrité de leur campement. Les soldats éthiopiens l’emploient au même usage ; les chefs s’en servent pour y accrocher un porte-missel et une bougie, lorsqu’ils se lèvent de nuit pour accomplir leurs dévotions.

De nombreuses décorations honorifiques entretiennent la vanité des Éthiopiens ; les principales sont une espèce de brassard en argent ou en vermeil, la demi-couronne, certaines parties de la peau du lion et diverses pèlerines de guerre. Le brassard, haut d’environ 20 centimètres, orné quelquefois de fort belles applications en filigrane doré, se porte au poignet droit ; à l’origine, il fallait avoir tué dix hommes pour l’obtenir. La demi-couronne, garnie de trois tourelles, est faite aussi en argent ou en vermeil ; elle s’attache sur le front, au moyen d’une espèce de lemnisque écarlate ; elle ne se donnait qu’aux cavaliers les plus intrépides ; l’homme qui la portait encourait la peine du fouet, si, même lors d’une défaite, il tournait le dos à l’ennemi.