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qu’il fut assez heureux de rencontrer à quelques pas du logis Madelon, notre servante, qui, par bonheur pour moi, était alors ma bonne amie et confidente, par laquelle il apprit l’extrême envie que j’avais de venir aux derniers effets avec lui ; elle lui montra la porte par où il pouvait entrer. Elle me vint aussi ensuite avertir, avec beaucoup de joie, de la rencontre qu’elle avait faite de don Gracio, et me dit qu’il souhaitait de savoir de moi comment et quand il pourrait entrer sans qu’il pût être aperçu de personne ; à quoi je satisfis très ponctuellement, lui faisant dire que la porte où il avait accoutumé de me venir voir ci-devant serait entr’ouverte et que je l’attendrais toute seule en me reposant sur un lit de damas, et que, s’il m’aimait, j’espérais qu’il ne me ferait pas trop longtemps attendre, car je suis impatiente quand j’ai donné un rendez-vous. Il vint qu’il était environ onze heures et demie. Je fus fort heureuse de le voir. Je t’avoue que la première embrassade me fit pour ainsi dire peur, non à cause de l’obscurité, mais parce que je ne m’attendais pas à le voir sitôt, et son abord me saisit, non de crainte, mais de joie. Enfin, ma frayeur fut pourtant bientôt passée. Ses baisers et toutes ses caresses me firent connaître que je devais être dans peu de temps la plus heureuse fille du monde. Ma pudeur, combattant mon amour désordonné, me fit recevoir ses premières caresses, qui n’étaient qu’un commencement, avec quelque honte en moi-même ;