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pût avoir eu tant de plaisir comme elle témoignait en avoir reçu.

Et je disais en moi-même : Hélas ! que sœur Cornélie a eu de peine ! Comment est-il possible qu’il ne la blessât point ? C’est ainsi que je me parlais ; puis je concluais : il l’a sans doute traitée fort doucement à cause de son jeune âge, car au plus avait-elle quinze ans. Tout étonnée, je l’entendais crier de douleur, et même croyais qu’elle allait mourir, ce qui me fâchait fort ; car je n’osais entrer dans la chambre, de peur de leur donner trop d’altération. Pourtant, quelques moments après, je la vis embrasser Frédéric avec ses deux bras, mais d’une force et d’une amitié très extraordinaires.

Frédéric ne lui en témoignait guère moins, en disant : Ah ! que j’ai du plaisir avec toi ! Bref, à force de se témoigner tant de chaleur l’un pour l’autre, suivie de soupirs et de gémissements. Ils se reposèrent et demeurèrent un espace de temps tous deux évanouis. Pour te faire voir l’amour excessif que sœur Cornélie avait pour Frédéric, je te dirai que nonobstant son évanouissement, elle se mit à le baiser et, s’il faut dire, partout, et lui parlait en des termes les plus doux du monde, d’où je conclus qu’elle avait eu bien du plaisir. Ce qui me donna envie d’en goûter de semblable, et même tu sauras que j’en étais devenue comme folle. À quoi pensant toute la nuit, je ne pus dormir qu’au matin, et par bonheur la fortune, qui