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Enta, la beauté deux fois divine ! Enta, la déesse des immortels caprices, à qui nos pères, les guerriers du Nord, offraient le sang des colombes. Enta, brune après le crépuscule du soir, blonde au jour, dès que le soleil vient baiser ses cheveux…

En disant cela, messire Olivier regarda tour à tour Berthe et Jeannine. Puis il reprit :

Quand la lumière se voile, vers l’heure où nous sommes justement, quand souffle la brise tiède des nuits d’été, la base du roc devient un autel. Je l’ai vu. Et j’ai vu les prêtresses de ce temple : Alma, la perle de Florence, Virgen, la topaze de Castille, Haydé, dont le front est de bronze ; toutes, elles viennent célébrer dans le sanctuaire mystique l’éternelle fête de la déesse Enta.

Messire Olivier reprit haleine. Dans la nuit qui était tout à fait venue, certains voyaient briller étrangement la prunelle de ses yeux. D’autres croyaient ouïr un conte de fée.

— Voire ! dit cependant dame Josèphe de la Croix-Mauduit ce qui se rapporte est donc vrai ? Et ce comte Otto Béringhem n’est pas un chrétien, puisqu’il entretient, sur son domaine, pareille idolâtrie ?

— Non, répliqua le baron sans hésitation ; ce n’est pas un chrétien.

— Alors, reprit la vieille douairière, pourquoi l’épée des chevaliers reste-t-elle au fourreau ?

— Parce que les chevaliers ont peur, répondit encore messire Olivier.

Il y eut un long murmure dans les ténèbres. Et pourtant pas une voix ne s’éleva pour crier à messire Olivier qu’il en avait menti. On savait bien que l’Homme de Fer était protégé par Satan.

— Et… demanda la douairière en hésitant un peu, est-il beau cavalier, ce païen-là ?

Les prêtresses, répliqua le baron d’Harmoy, qui composent le vivant collier de la déesse Enta, disent que jamais homme ne leva si haut un front mortel. Quant à moi, je n’ai point aperçu son visage. Son casque ne relève sa visière que devant la