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Jeannine. La pauvre Jeannine, triste et muette, se tenait auprès de la croisée.

— C’est ce bel oiseau-là, pensa Javotte, qui me vaut ce paquet ! Je te retrouverai, péronnelle ?

— Voyons ! reprit Berthe avec une pétulance croissante, m’entends-tu, oui ou non ? Je ne veux pas de ce corsage ! je ne veux pas de cette ceinture ! je ne veux pas de ces tresses lourdes et gauchement disposées !

— C’est bon, c’est bon, tout à l’heure c’était superbe !

— Je veux… je veux être jolie !

— Toute une chacune souhaite ça assez.

— Silence et à l’ouvrage !

Ce fut un grave et solennel quart d’heure, un vrai coup de feu, où Javotte ne se montra point trop au-dessous de la responsabilité qui pesait sur elle.

Elle se multiplia, elle se surpassa.

La une taille de Berthe s’assouplit sous un autre corsage ; ses beaux cheveux ondulèrent, prodiguant leurs opulents reflets.

Jeanninc était restée pensive. Il y avait une larme à sa paupière.

Était-ce l’envie ? oh ! non, Jeannine n’avait rien de mauvais dans le cœur, mais quand elle interrogeait l’avenir elle n’y découvrait que menaces et tristesses. — Là ! s’écria Berthe ; viens ça, Jeannine ! suis-je belle ?

— Oui, demoiselle Berthe, répondit la jeune fille, qui essaya de sourire ; vous êtes bien belle.

— Tu nous accompagneras, Jeannine ?

— Non, répondit celle-ci avec un gros soupir, cela m’est impossible.

— Je le veux…

— Je vous en prie, demoiselle, ne me demandez point cela !

Mais Berthe lui prit la tête à pleines mains et la baisa gaîment en répétant :

… Je le veux !