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LA BELLE ALSACIENNE


ce n’est pas sans sujet que mes idées deviennent plus sombres qu’à l’ordinaire.

Je touche à un temps qui n’est pas le plus amusant de ma vie : de ces temps critiques auxquels il est rare de pouvoir se soustraire lorsqu’on a le malheur d’avoir l’âme trop bonne et tant soit peu portée à obliger ; on est bien à plaindre lorsqu’on néglige imprudemment de mettre des bornes à sa générosité. Nous sommes sujettes à de certaines tribulations d’état, dont la droiture de nos intentions ne peut nous garantir.

J’avertis ici les personnes que la tristesse rebute et qui n’aiment pas à s’attendrir sur les infortunes de leurs semblables de passer quelques feuillets de ces mémoires sans se donner la peine de les lire. Le triste événement dans le récit duquel je vais entrer n’obtiendrait sans doute pas leur suffrage ; ce n’est pas actuellement pour elles que j’écris : c’est pour les bons cœurs, pour ces âmes tendres et compatissantes qui aiment à entrer dans les peines des