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LA BELLE ALSACIENNE


pour n’être pas formaliste sur les épithètes. Je trouvais fort mauvais qu’un petit danseur de la seconde classe osât s’oublier avec moi ; les termes peu mesurés dont il se servait pour me reprocher la dureté de mon procédé me parurent autant de blasphèmes. Je le traitai à mon tour sans ménagement ; la conversation devint extrêmement vive. Lorsque deux cœurs ulcérés commencent une fois à s’épancher en invectives, c’est à qui renchérira avec plus d’énergie.

La fureur dont j’étais animée me fournissait, avec une volubilité extraordinaire, les expressions les plus piquantes ; mon ennemi ne se possédait plus. Je ne sais si les injures d’une femme sont plus outrageantes ou si, moins fertile que moi et s’étant épuisé d’abord, il n’avait plus rien que de faible à me dire ; mais je vis le moment que j’allais être traitée comme un homme.

Mon amie et son tendre amphitryon, dont ce vacarme avait interrompu le délicieux tête-à-tête, survinrent fort à propos. Ils