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LA BELLE ALSACIENNE


Il prit apparemment mon air ennuyé pour une tendre rêverie ; il en voulut profiter en galant homme qui savait épargner aux personnes affectées de son mérite la honte de céder, en s’apercevant de leur défaite : il se mit en devoir d’abréger les gradations qu’il regardait comme inutiles pour la réussite de son entreprise. Je revins de mon étourdissement, à l’impression que firent sur moi certains gestes dont la familiarité me choqua.

— Votre main s’égare, lui dis-je, monsieur, et cela d’un air très sérieux.

— Ah ! mon adorable, reprit-il, pourquoi vous en apercevoir ?

— C’est que je n’aime point du tout ces façons-là, lui répliquai-je.

Le ton sec dont je prononçai ce peu de paroles l’étourdit : il est fâcheux d’avoir trop compté sur son petit mérite, on court risque de jouer un sot personnage lorsqu’il échoue. La vanité ne se fait point du tout à ces sortes de méprises. Mon homme me parut déconcerté de mes rigueurs. L’air de suffisance qu’il avait affecté d’abord en