Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.

bien, a du goût dans le choix et l’arrangement des chiffons : bref, je n’ai qu’à me louer d’elle.

De temps en temps sa prunelle lance des éclairs, mais l’expression de son regard est habituellement douce, presque mélancolique. Elle m’accompagne dans mes courses aux magasins et mes promenades.

Ce soir-là, il me sembla qu’elle allait bien lentement pour retirer mes bas et qu’elle promenait ses mains du haut en bas sur mes jambes. Tout à coup, elle me dit : « Comme madame a la peau douce et fine !… »

— Vous trouvez, Thérèse ?… Je l’ai comme tout le monde…

Et je me levai pour lui permettre de dégrafer mon corsage et de me passer ma robe de chambre. Elle reprit : « Comme madame a une élégante chute d’épaules !… »

— C’est bien, je n’ai plus besoin de nous, Thérèse, vous pouvez vous retirer ; ne sortez pas et couchez vous quand vous voudrez.

Puis, sans plus m’occuper d’elle, je m’installai devant mon feu, écrivis quelques lettres sans importance à ma sœur, aux Russel pour répondre à une invitation à dîner, à ma modiste, etc. Je parcourus ensuite les journaux du soir. Bref, il était dix heures quand je me mis au lit. Avant de m’endormir, je voulus relire tes deux dernières lettres, qui me mirent dans un singulier état.

Pourquoi n’étais-tu pas là, mon cher mari ? Je baissai ma lampe en veilleuse et je me disposai à dormir. Mais le sommeil ne vint pas. La lecture que je venais de faire, la pensée des plaisirs que tu avais goûtés, que tu goûtais sans doute à ce moment même dans les bras d’une autre, me causaient une agitation que tu devines et qui éloignait le repos. Enfin, n’y tenant plus, je m’installai commodément sur le dos, ramenai mes pieds sur mes fesses, écartai les genoux, et ma main se porta naturellement vers certain endroit…

— 29 —