Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/130

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Puis il ajouta, en m’embrassant derrière l’oreille, pendant que nous descendions l’escalier : « Voulez-vous me donner des leçons ?

Je répondis par un sourire.

Une fois dans la rue, je fis signe à Thérèse de s’en aller de son côté pour me laisser seule avec Adrien. Elle esquissa une grimace boudeuse et me menaça du doigt, mais elle consentit enfin à nous quitter et annonça qu’elle était obligée de rentrer de suite chez sa tante.

Adrien ne se tenait pas d’aise et serrait fortement mon bras. Mon amie partie, il me demanda la permission de me reconduire jusque chez moi, ce que je refusai, bien entendu ; je lui offris comme dédommagement, de faire une courte promenade et de le mettre sur le chemin de son domicile. Il faisait nuit noire, j’avais rabattu ma voilette et relevé le col de mon manteau : je ne risquais donc rien à traverser, au bras du jeune étudiant, la place de la Concorde.

Nous marchions en bavardant, comme deux amoureux. Je t’assure, mon cher mari, qu’à ce moment j’avais tout oublié et que je ne pensais guère à M. Léo Fonteney… Je parlais pour ne rien dire et riais comme une folle, étourdie sans doute par le grand air et la liberté.

— Où demeurez-vous ? lui demandai-je.

— Au no 25 de la rue de Bourgogne, derrière les Invalides ; ma chambrette donne sur la rue de Varenne. Tous les matins je vais à l’École de Droit, dont je suis les cours ; c’est maman qui a choisi pour moi ce quartier tranquille, loin de Bullier et des brasseries du Boul’ Mich’.

— Quel jeune homme modèle ! fis-je : vous voici devant votre porte, monsieur Adrien, je vous quitte…

Cela ne faisait pas l’affaire de mon jeune amoureux, aussi me retint-il de toutes ses forces, me suppliant de monter jusqu’à sa chambre et jurant qu’il serait bien sage… Je me décidai enfin à accepter la tasse de thé qu’il m’offrait, et

— 128 —