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de Guillaume de Pazzi. Le duc, devenu tyran de Florence, apprend que l’on conspire contre lui ; aussitôt, et sans autre examen, il fait saisir un des conjurés ; conduite imprudente, qui détermina les autres complices à prendre les armes et à lui arracher le pouvoir.

En 1501, Guillaume avait été nommé commissaire de la république dans la Valdichiana, quand il apprit qu’il venait de se tramer dans Arezzo un complot en faveur des Vitelli, pour arracher cette ville des mains des Florentins. Il se transporte aussitôt dans Arezzo, et, sans examiner ni les forces des conjurés ni les siennes, sans se précautionner d’aucun appui, mais guidé seulement par les conseils de l’évêque, son fils, il fait saisir un des conspirateurs. Cette arrestation met aussitôt les armes à la main aux autres conjurés : ils délivrent la ville du joug des Florentins ; et Guillaume, de commissaire, se trouve prisonnier.

Mais quand une conspiration est faible, on peut et l’on doit la réprimer sans balancer. On ne doit en aucune manière imiter la conduite opposée qui fut suivie dans les deux circonstances suivantes : le duc d’Athènes, dont nous avons déjà parlé, jaloux de montrer qu’il se croyait sûr de l’affection des Florentins, fit mourir un citoyen qui lui avait révélé une conspiration ; d’un autre côté, Dion de Syracuse, voulant connaître les sentiments d’une personne sur laquelle il avait conçu des soupçons, consentit à ce que Calippus, qui possédait toute sa confiance, feignit de conspirer contre lui.

Tous deux eurent à se repentir de leur conduite. Le premier ôta le courage aux accusateurs, et l’inspira à ceux qui voulaient conspirer ; le dernier facilita sa propre ruine, et il fut pour ainsi dire le chef de la conjuration qui le menaçait, comme l’expérience le prouve : en effet, Calippus, pouvant sans soupçon conspirer contre Dion, ourdit sa trame de manière qu’il put lui arracher le pouvoir et la vie.